• Hey salut toi ! C'est quoi ton petit pseudo ? Camille, c'plus simple qu'un pseudo. x) • Et ton surnom ? Kamikaze. :3 • Girls or Boys ? Girls Power ! • Comment as-tu débarqué sur le forum ? A cause d'une dingue en ciré jaune. • Et, est-ce qu'il te plaît ? Genre, quelle autre raison pour m'inscrire ? *-* • T'as encore un petit truc à dire pour les admins ? Je viens de retrouver mon smiley préféré grâce à vous.......... (L)

Cher journal,
J’ai l’impression d’être une gamine de douze ans de vouloir raconter ma vie à… un journal. Genre, c’est trop la honte de parler à quelqu’un en chair et en os. Je suis un vrai minable, en fait. En même temps, mon journal se résume à une feuille de papier, et je ne compte pas réitérer l’expérience un autre jour. C’est juste que là, je sais vraiment plus quoi faire.

« Mana, qu’est-ce que tu fous encore ? Tu écris un bestseller ? Dépêche-toi qu’on soit riche, parce que là, je sais pas avec quoi je vais payer ma part du loyer. »

Je disais donc, cher journal, voilà pourquoi je ne sais plus quoi faire. Théoriquement, tu dois tout connaître sur moi, vu que tu n’es que le reflet de ma propre pensée, donc tu sais que le type qui braille à côté, là, c’est mon frangin. Pour être précis, mon frère aîné, Denzel. Je te l’accorde, ce nom me donne toujours envie de l’appeler Bretzel, en revanche, je n’ai plus envie d’avoir un œil au beurre noir ce mois-ci. Denzel, Denzel, Denzel. Comment ce crétin a réussi à passer le concours d’entrée de la fac de médecine ?

« C’est bon, je paye tout. Tu me rembourseras quand t’auras du fric. »

Bon, évidemment, il s’est vite rendu compte que la médecine, ce n’était pas sa tasse de thé, et il s’est mis en tête de fonder un groupe de rock. Je déteste mon frère. Encore, s’il avait été bon en guitare et avait eu un peu de talent, ça aurait peut-être pu marcher avec beaucoup, beaucoup de chance. Mais là, c’est un cas désespéré. En plus, les potes de son groupe sont meilleurs pour saccager mon appartement (parce que, vu que Denzel ne paye JAMAIS ce foutu loyer, c’est MON appartement, laisse-moi au moins ça) et dévaliser le frigo que pour jouer. Donc, au final : c’est moi le perdant, le naïf, la bonne poire. JE SUIS PAS UNE BANQUE.

« Oh, merci Mana, t’es un cœur. »

C’est quand même un comble, que moi, le petit-frère de vingt-quatre ans, je doive m’occuper de ce débile qui a vingt-sept ans. Merci, maman, papa, de m’avoir donné ce boulet. Le point positif, c’est que je vois enfin le bout de mes études, huit ans de psychiatrie, oui, j’ai deux ans d’avance, c’est que la partie de cerveau que mes parents ont pas refilée à Denzel, c’est moi qui l’ai héritée. Pourquoi c’est pas moi le préféré ? La vie est injuste.

« Bretz... Denzel, arrête de lire par-dessus mon épaule. »

Finalement, mon pas d’œil au beurre noir ce mois-ci, c’est loin d’être gagné.


Du plus loin que je m’en souvienne, j’ai toujours eu peur des gens. Que ce soit de ma tante Lisa et de son rouge à lèvre carmin qui laissait des marques, ou de mon grand-père Joe qui avait un rire de père Noël, ou encore de l’oncle Louis, le Français, qui avait un sérieux problème d’alcool. Je craignais mon frère, parce qu’il essayait de me faire bouffer des vers de terre et mon père parce qu’il était grand, basé et ne souriait jamais. Je prenais le vieux voisin et sa femme pour des extra-terrestres et la blondasse d’en face avait un décolleté qui me dégoûtait. La seule personne que j’aimais, c’était ma maman, parce qu’elle était douce et réconfortante, et qu’elle ne me criait pas dessus quand je ne disais pas bonjour à quelqu’un, à la différence de mon père qui me filait volontiers deux torgnoles pour m’éduquer.

Ma mère, elle était belle, à l’époque. Denzel et moi, on tient d’elle pour ça. En fait, on n’a strictement rien à voir avec notre père, et surtout pas avec sa face de bûcheron et sa panse à bière. Mon père ne m’a jamais supporté. Denzel était trop parfait comparé à moi. Il était sociable, sportif, bagarreur (pour mon père, c’était une qualité). Il irradiait de partout, à chaque fois qu’on allait quelque part, tout le monde avait les yeux fixés sur lui. Moi, j’étais un loser. Intello, faible et bizarre. Qui reculait de dix pas quand on voulait l’approcher. Qui ne répondait pas aux questions qu’on lui posait. Toujours le nez dans un bouquin. J’avais pas d’amis. Et vu ce qui traîne dans les collèges et les lycées de nos jours, j’ai toujours trouvé que c’était tant mieux pour moi. C’était même pas comme si on me brutalisait : Denzel se réservait ce droit et menaçait tous ceux qui avaient en tête de me faire du mal. J’étais simplement invisible.

Quand vint le temps des petites copines, Denzel en avait à la pelle, et jonglait souvent avec cinq à la fois. Ce qui remplissait le paternel de fierté. Pas ma mère. Enfin, en quelque sorte, si : elle préférait ça que moi, qui n’avait personne à l’horizon. C’était pas vrai, dans le sens où j’étais tout aussi mignon que Denzel et que plusieurs filles m’avaient déjà demandé pour sortir un de ces soirs. Ce qui changeait, c’était que je disais toujours non. Un beau jour, voyant que ça peinait trop ma maman, j’ai invité une fille à la maison, pour faire un effort. Ma mère était si heureuse, elle m’avait même dit que je ferais un merveilleux mari, en faisant la vaisselle. J’ai vingt-sept ans, je suis encore trèèèèèèèèèès loin de me marier, je peux vous l’assurer.

Puis Denzel entra à l’université un an avant moi. Il ne déménagea pas, malheureusement. Sauf quand, l’année suivante, j’entrai moi aussi à l’université pour suivre des études de psychiatrie et que je décidai de prendre un appartement. Il ne fallut pas attendre un mois pour qu’il vienne s’incruster.

« Denzel, s’il te plait, la musique. »
« Arrête de chialer, je médite. »
« Avec du Metallica à fond ? »
« Ouais. Hey, si tu veux que je devienne un grand musicien, il faut que tu me laisses développer ma spiritualité musicale tranquille. »

Denzel et ses théories à deux balles. Presque la trentaine, et aucune amélioration. Denzel était un parfait sujet d’étude pour mon mémoire. J’ai brillamment réussi mes études. Et pourtant, j’ai pas déniché de boulot. Du coup, je suis psychologue à domicile, et le pire : plutôt conseiller conjugal. Allez comprendre pourquoi je fais ça, à part pour gagner ma vie. S’il y a bien quelqu’un qui est naze en relations, en particulier amoureuses, c’est bien moi. Mais faut bien gagner sa vie.

Ah, et voilà le pompon : je vois des gens qui existent pas, des FANTÔMES, mes chers. Alors, après ça, qu’on vienne pas me dire d’arrêter d’être rabat-joie.